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Rémi n’était ni zadiste ni activiste. Il avait une conscience écologique

Des extraits du journal POLITIS, des excellents articles des journalistes Vanina DELMAS et Maxime SIRVINS, qui remettent les pendules à l’heure avec le témoignage de Véronique, la mère de Rémi Fraisse.

Je vous encourage à acheter ce numéro et lire les articles concernant le dossier Sivens. Le journal n’est plus vendu chez votre marchand de journaux, il est disponible en numérique ou au format papier sur commande.

Quasiment dix ans de silence, de batailles ardues face aux mensonges de l’État et à l’impunité des forces de l’ordre après le drame de Sivens. Véronique témoigne aujourd’hui avec franchise et pudeur pour rétablir les faits et ouvrir les yeux de celles et ceux qui ne réalisent pas le degré de répression qui frappe les luttes contre les mégabassines ou contre l’A69. Sa crainte : que l’histoire tragique de son fils ne se répète.

Voulez-vous nous raconter qui était Rémi ?

Rémi était un jeune pacifiste plein de vie qui faisait des études en gestion et protection de la nature. Il était bénévole à France Nature Environnement (FNE) Midi-Pyrénées et avait adhéré à la Ligue des droits de l’homme. Avec FNE, il faisait des relevés de la présence de la renoncule à feuilles d’ophioglosse, une fleur jaune protégée qui est aujourd’hui devenue son emblème. Il était respectueux des autres, des animaux, de la nature. Je me souviens, quand il était petit et qu’on faisait des balades en famille, il ramassait avec son père les déchets pour les mettre à la poubelle. Il a eu une conscience écologique très tôt et disait souvent que « les arbres, c’est la vie ». Il essayait de faire en sorte que ses actions soient conformes à ses valeurs. Mais c’est le hasard qui l’a conduit à Sivens.

La suite de l’histoire, vous la connaissez. Rémi n’était ni manifestant, ni zadiste, ni activiste. Oui, il avait une conscience écologique. Et peut-être que s’il avait assisté ce jour-là à de tels événements et que quelqu’un était mort, il serait devenu militant.

Que pensez-vous de l’utilisation du terme « écoterroriste », employé notamment par l’ancien ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin ?

À l’époque de Sivens, on parlait de « jihadiste vert ». Sur le terrorisme, l’ONU parle d’actes criminels conçus ou calculés pour terroriser l’ensemble d’une population ou un groupe de population. Le terroriste est une personne qui porte atteinte à la sûreté de l’État, et qu’on doit éliminer. Les mots ont un sens ! Est-ce l’image que l’on veut donner des militants écologistes ? Est-ce ainsi que l’on veut traiter des personnes ayant une conscience écologique et qui dénoncent des projets écocides ?

Violence de la réponse judiciaire

Le projet de barrage de Sivens visait à créer une retenue d’eau pour l’irrigation agricole sur la zone humide du Testet, riche en biodiversité. Dès le départ, il a suscité une forte opposition. Des associations, des mobilisations ainsi qu’une ZAD se sont créées pour dénoncer son impact environ­nemental destructeur. Claire Dujardin souligne l’intensité des confrontations avant la mort de Rémi Fraisse. « Il y avait déjà des affrontements violents sur le terrain et, plusieurs jours avant sa mort, on pouvait entendre des manifestants dire : “Vous voulez un mort ? Arrêtez cette violence.” » La ministre de l’Écologie de l’époque, Ségolène Royal, avait demandé un rapport dans lequel les experts avaient conclu, quelques jours avant le drame, que le barrage n’était pas d’intérêt public. Mais ces conclusions n’ont pas été rendues publiques. « Tout indiquait qu’il fallait suspendre le projet, mais la répression s’est poursuivie. »

Dans la nuit du 25 octobre 2014, les gendarmes utilisent des grenades offensives pour disperser les manifestants. L’une d’elles tue Rémi Fraisse sur le coup. Des manifesta­tions éclatent dans plusieurs villes, dénonçant la brutalité policière. Cependant, pour Me Dujardin, la mort de Rémi Fraisse n’a pas entraîné de remise en question profonde au gouvernement, comme cela aurait dû être le cas. « L’exécutif a immédiatement cherché à criminaliser Rémi, à minimiser la responsabilité des forces de l’ordre », explique-t-elle.

La procédure judiciaire, longue et frustrante pour la famille, n’a débouché sur aucune mise en examen. Les demandes des avocats pour des reconstitutions ont été refusées. « Le procès aurait pu permettre à la famille d’avancer et aux insti­tutions de repenser le modèle de maintien de l’ordre, déplore l’avocate. Le non-lieu a été très dur à encaisser pour la famille, parce qu’au-delà de la violence de perdre leur fils, il y avait la violence de la réponse judiciaire. » Finalement, la famille de Rémi a porté l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme en 2021 et attend toujours une décision.

Apifera a voulu rendre hommage à Rémi, nous ne pouvions écrire un meilleur article que le témoignage de mère de Rémi et les textes des deux journalistes.

Nous avons été outrés des propos tenus après la mort de Rémi par le Président de Conseil général de l’époque M. Carcenac et des élus politiques de l’époque de tous bords. Pour ce qui est des pensées laides, l’esprit humain n’a pas de limite.

l’hommage d’Apifera à l’endroit
où Rémi fut tué

Mise en page rédaction Christian Conrad Naturaliste